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Le tiers impliqué dans un accident du travail qui a dû indemniser le salarié n’a aucun recours contre l’employeur sauf faute intentionnelle de ce dernier

Lorsqu’un salarié est victime d’un accident du travail qui peut être imputé à son employeur mais aussi à un tiers étranger à l’entreprise (« partage de responsabilité »), la victime de l’accident peut alors intenter à la fois :

-une action en reconnaissance de la faute inexcusable contre son employeur ;

-et une action en responsabilité civile contre le tiers étranger à l’entreprise pour qui il travaille, pour obtenir réparation des préjudices non couverts par les prestations de sécurité sociale (c. séc. soc. art. L. 454-1).

Dans ces circonstances, le tiers étranger peut se retrouver tenu par les juges de réparer l’intégralité du préjudice dans la mesure où celui-ci n'est pas indemnisé par les prestations de sécurité sociale, peu important la part de responsabilité de l’employeur dans l’accident (cass. ass. plén. 22 décembre 1988, nº 85-17473, B. ass. plén. n° 10). Il ne dispose alors d’aucun recours en garantie contre cet employeur qui lui permettrait d’obtenir le remboursement d’une partie des sommes versées en réparation du préjudice subi, sauf à prouver que l’employeur a commis une faute intentionnelle (cass. ass. plén. 31 octobre 1991, nº 88-17449, B. crim. n° 388).

Pour rappel, la faute intentionnelle implique l’intention délibérée de causer un dommage corporel ou psychologique.

Dans une affaire jugée le 29 novembre 2018, la Cour de cassation est venue confirmer ce mécanisme. Un salarié avait été victime d'un accident du travail alors qu'il manœuvrait un engin emprunté à une autre société, engin qui s’est avéré défectueux. Le salarié avait alors engagé les deux actions sus-évoquées.

La société tierce avait ensuite recherché la garantie de l’employeur à hauteur de la moitié de toutes les condamnations prononcées contre elle. La cour d’appel lui a donné raison après avoir relevé que chaque entreprise avait sa part de responsabilité dans l’accident :

-l’employeur pour avoir demandé à son salarié d'utiliser un engin élévateur appartenant à une société tierce alors que ce salarié n'était pas titulaire du permis cariste et n'avait aucune qualification pour conduire ce type d'engin, mais aussi pour avoir emprunté cet engin sans s'être assuré qu'il était en bon état et qu’il permettait d’effectuer sans risque les opérations de manutention demandées ;

-la société tierce pour avoir mis à disposition de l’employeur un engin dont le système de freinage était inefficace du côté gauche, sans alerter l’utilisateur de l'engin sur cette déficience.

Alors même que l’employeur avait rappelé le contenu des règles sur l’indemnisation des accidents du travail lorsqu’un tiers est impliqué, la cour d’appel a balayé cet argument au motif, selon elle, que ces règles n’ont pas pour objet de permettre à l’employeur d'éluder une partie des conséquences de sa responsabilité dans l'accident de son salarié, notamment en le dispensant d'indemniser certains chefs de préjudices.

La Cour de cassation, dans la droite ligne de ses décisions antérieures, a cassé l'arrêt de cour d’appel après avoir rappelé que le tiers étranger à l'entreprise, qui a indemnisé la victime d'un accident du travail pour tout ou partie de son dommage, n'a pas de recours contre l'employeur de la victime, sauf si la faute de l'employeur s’avère intentionnelle.

Dès lors qu’il ne ressortait pas des constations de la cour d’appel que l’employeur avait commis une faute intentionnelle, ce dernier ne pouvait donc pas être condamné à garantir l’entreprise tierce.

Cass. civ, 2e ch., 29 novembre 2018, n° 17-17747 FPB

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